Seoul, Korea 

En 9'79, Ben Johnson vient de pulvériser le record du monde du 100m et s'adjuger le titre olympique au nez et à la barbe de Carl Lewis, au désespoir de ma soeur Fanny. Contrôlé positif aux amphétamines (c'est quand même mieux que l'EPO d'Armstrong ou la testostérone de DSK) quelques heures plus tard, il écrit la page la plus sombre de l'histoire des Jeux de Seou (1988)l. Quatorze ans plus tard, la Corée se hisse en demi-finale du Mondial de football ; des millions de Coréens reprennent le slogan "Be the Reds !". C'est à peu près la seule chose que je sais du Pays du Matin Frais  (Hanguk) au moment où Miss Oh vient me récupérer à l'aéroport. On s'en va, tambours battants, vers Hong-dae où les soldats américains ne sont pas en odeurs de sainteté. Depuis leurs trop nombreuses bagarres et violences, couvertes par leur hiérarchie, ils sont même interdits dans nombre de bars et clubs de Seoul. L'accord de Défense mutuelle de 1953, toujours d'actualité, asservit le pays aux Etats-Unis : il leur confie le commandement des forces militaires en cas d'attaque et permet surtout d'extrader les G.Is en cas de viols, accidents... Formidables ces amis, n'est-ce pas ?! Le soutien américain au Sud constitue le gros problème d'une région où la Guerre froide est toujours d'actualité. Avec celui chinois sur la Corée du Nord, la paix est-elle possible ? En visitant la DMZ qui n'a de démilitarisée que son nom, on peut sérieusement en douter... Cette zone est un no man's land de 40km, et comme le dit stupidement ce film de propagande qui ressemble plus à un blockbuster hollywoodien qu'au documentaire qu'il est censé être, c'est formidable de vivre dans la DMZ ! : les taxes sont moindres, les garçons passent outre le service militaire masculin obligatoire, la nature est vierge... For-mi-dable ! Une brochure touristique annonce même « North Korea Veiled in Mystery ! Let us go see the society. ». Business is business. Le pays est divisé depuis les accords de Panmunjeon de 1953, la fracture est profonde ; ainsi, les Sud-Coréens ont besoin d'une autorisation spéciale pour aller au Nord dans des sites « nettoyés » où ceux qui y travaillent sont chinois. Et pourtant : les Coréens sont l'un des peuples les plus homogènes de la planète, parlent la même langue, écrivent tous le hangeul... Quel beau gâchis. L'espoir est toutefois réel, car la guerre est officiellement terminée depuis 2007.

 

DMZ, Korea

 

DMZ, Korea

Seoul est une ville qui fascine, pleine de temples, parcs, d'histoire, de maisons basses, universités spacieuses ou rues calmes où il fait bon s'y promener. J'emmène Jieun découvrir Fractal flowers, oeuvre vidéo de Miguel Chevalier, mis en place le long de Cheong-gye-cheon par un Nico que certains connnaissent, elle, la tour Nam-Sa qui domine la ville, les restos U, la modernité et les facilités de l'université de Hanyang... les facs parisiennes, en ruine, semblent dater d'un temps révolu. Il y a quelques détails qui m'interloquent ; la gratuité est ainsi une valeur encore très forte. Partout des fontaines sont à disposition, l'entrée des très beaux musées est libre (le SeMA par exemple), les toilettes gratuites sont légions, des ordinateurs sont à disposition dans les gares ou aéroports, les restaurants offrent soupe, "appéritifs" et parfois thé à volonté. Des détails ? Chapeau ! Dans le métro, une chose me marque : je suis plus souvent le seul Européen ; cette société ne me semble que peu mixte. Les Japonais peut-être, qui ont occupé (devasté dirons nous) le pays pendant 40 ans, les Anglo-Saxons professeurs d'anglais, sont toutefois nombreux. On reverra ainsi Jeff, que nous avons connu a Chang Maï, chez lui à Daegu. On partagera la visite du temple de Hensa et bien sûr un dîner savoureux..., car la Corée offre des saveurs culinaires exceptionnelles. Comment ne pas tomber amoureux de cette gastronomie qui marie la mer, la passion des BBQ locaux, les soupes, riz.... Seuls les desserts ne sont pas à la hauteur. Que dire du galbi, bossam, teok-guk, U-Dong, meuntang, zam-pong, teok-bo-ki, kal-guk-su, go-deung-uh jorim, sam-gyup-sai, bulgogi, bibimbab, du hoi fabuleux au marché Jagalchi de Busan, des dark-kochi, kimbab, kimchis (1), de la pieuvre dévorée vivante à la manière de Old boy... et j'en passe ! Les enseignes françisées (Paris Baguette, Tous les Jours) ou cafés au nom fançais (Le Petit Prince par exemple) font un carton.

 

Seoul, Korea

 

Deokhsju Palace, Seoul

Seoul vit, est dynamique : la culture du clubbing est forte, les salons karaokés privés sont une institution que l'on quitte tard pour aller avaler du poulet dans un de ces chicken & beer qui pullulent et l'on peut louer un salon tout équipé pour regarder son dvd en location. Ce pays est aussi celui où la connexion wifi est la plus dense au monde. Que de chemins parcourus depuis l'armistice de 1953. Tout cela semble formidable, mais toute société a son côté sombre. Les vacances sont rares, la pression des études puis professionnelle est énorme... Le pays compte peut-être le plus haut taux de suicide des pays de l'OCDE. Je me sens parfois enfermé dans une société trop rigide : le conformisme semble la règle, les relations intimes peu affichées, les écarts mal vus. Ici, comme dans chaque pays, les coutumes sont locales : les filles ne montrent pas leur décolleté mais leurs jambes, les règles de politesse différentes, Ici, on ne fait pas de vagues... En Corée, beaucoup seraient des outsiders (déviants).dans l'étude sociologique d'Howard S. Becker ! Les motels, peu chers et au confort ultime, accueillent les jeunes couples qui ne partagent pas un logement ou ne peuvent le faire... Cette société est ainsi très conservatrice.

 

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C'est l'heure du festival de l'université d'Hanyang ; le bar de la section « Internationl studies » de Jieun fait recette. J'avale facilement quelques Hite, Max ou Cass (bières) en compagnie de ses amis, quelques bouteilles du très bon marché soju, et vais voir les squelettiques Girls Generation en concert. Pas étonnant que les Coréennes soient obnubilées par leur silhouette et que la chirurgie esthétique est ici un sport national, presqu'au même titre que le baseball ! Car, Jieun fan des Doosan Bears m'initie à ce sport sacerdotal en Corée, arrivé dans le pays en même temps que les Japonais (1905.) Rien ne se passe ou presque pendant les 3 h ½ du match... magnifique... Peut-être qu'elle me renvoie simplement l'ascenseur, l'ayant initié au rugby dans un pub de Koh Tao ! Nous revoyons ensemble certains de ses amis que j'ai rencontré en Egypte ou Syrie : son instructeur de plongée, la rigolote Yujin, Sodam ou encore l'extravagante Hye-Ji, qui m'emmène dans un festival de rue plein d'Anglo-Saxons puis danser à Hong-dae, mais aussi ses amis Joy et Chan qui deviennent miens, et avec qui, accompagnés de Djo, une française qui vit à Londres et que l'on espère revoir et revoir - ici ou ailleurs -, on engloutit quelques soju ou les alcools de riz que sont le cheong-ha et le maguli. Je me fais d'autres « amis » comme cette peintre Justina ou Wonnie, une designer-grapheuse locale. Les murs de Hong-dae regorgent d'ailleurs de paintures murales ; en amoureux du street art, je suis aux anges (2)... Enfin, de ce long mois passé à Seoul, je retiens aussi les concerts de YB, le groupe de rock le plus populaire du pays qui contrebalance avec un environnement musical assez pauvre (pop coréenne), puis des légendes rock Bu-hwwal (Revival). Electrique ! Mon stylo me démange, mais il faut faire des choix : narrer mon aventure hong-kongaise par exemple !

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(1) Pour savoir de quoi il s'agit, aler voir l'article : "The delicious Korean food" !

(2) Les photos sont disponibles dans l'album "Street Art"

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